Rencontres avec les nomades digitaux suisses
Fabienne & Benoit: nomades et pros des sites “clé en main”
« Passion, persévérance et curiosité »
Pour cette première interview de nomades digitaux suisses, j’ai choisi novo-monde. Après les avoir découverts sur Facebook, j’ai écouté un podcast où Fabienne (31 ans, Lausannoise aux racines alémaniques) et Benoit (33 ans, un Valaisan « pure souche » 😉) parlaient de leur expérience de nomades digitaux. J’ai tout de suite pensé qu’ils auraient plein de choses intéressantes à nous raconter! La preuve ci-dessous.
Interview par auxbonheursnomades.
Photos © novo-monde.com
Q. – « Nomades digitaux », « entrepreneurs voyageurs » ou « remote workers » : comment vous définissez-vous ?
F. -Je dirais des « nomades digitaux ». On est des « nomades » dans le sens où on n’a pas de « chez nous » : on n’a pas de voiture, pas d’appart. Et puis « digitaux », puisque l’on gagne notre vie grâce à une connexion Internet et un ordinateur.
Q. – Que faisiez-vous avant votre vie de nomades ?
F.- Moi, j’étais dans la gestion de projet dans le domaine du web pour une start-up. Benoit faisait son doctorat. On vivait à Vienne. En fait, dans notre cas, la transition s’est faite en deux étapes. Tout a commencé avec un voyage en tour du monde. En mode voyage, avec nos économies et sans travailler en route. C’est à ce moment qu’on a commencé notre blog. Au retour, on a repris un « vrai boulot », comme disent les parents (rires). A Zurich. Moi, dans la gestion de projet, et Benoit comme développeur, dans la même boîte. A côté de notre boulot, on a continué notre blog; Ça a progressivement pris de l’ampleur. Il a fallu faire un choix : le blog ou le boulot. On a tranché et démissionné pour fin août 2016.
Q.- Vous aviez déjà une source de revenu annexe à votre travail au moment de vous lancer dans la vie nomade ?
B.- Oui. On ne s’est pas lancés du jour au lendemain comme nomades digitaux. C’est plutôt une conclusion qu’on a tirée vu notre situation. Soit on abandonnait notre blog et nos projets de développement web pour continuer de travailler en entreprise. Soit on donnait une chance à ce projet, certes avec des revenus moindres mais en le poussant à 100%.
Q.- Lorsque vous avez démarré le blog. Quelles connaissances aviez-vous ?
B.- A ce moment-là, aucun de nous deux n’était développeur web. Moi, j’avais aussi envie de créer un site web pour justement apprendre à développer des sites. J’ai profité de notre tour du monde pour apprendre à créer un site à partir de zéro, sans WordPress ou les autres outils de ce type. C’était en 2012. Puis, de fil en aiguille, le site a grandi. Nos compétences aussi. Aujourd’hui, après cinq ans environ, on est tous les deux dans ce domaine-là.
Q. – Donc, vous codez ?
B.- Moi, je code. Fabienne s’occupe davantage du SEO, de la création de contenu et des traductions.
Q.- Vous vous êtes donc formés en autodidactes ?
B.- Totalement.
Q. – Quels outils conseilleriez-vous à quelqu’un qui souhaite se former au développement web ?
B.- Je conseillerais openclassroom.com. C’est vraiment bien. Il y a aussi des cours sur le codage de vidéos.
F.- Aussi pour le référencement. Il y a beaucoup de contenus gratuits. Leur offre est vraiment bien structurée.
Q. – Comment s’est passé concrètement le passage à la vie nomade ? Vous avez quitté votre appartement et vendu vos affaires ?
F.- On habitait au centre de Zurich. Les appartements sont très demandés. On savait que notre appartement partirait très vite. On a résilié hors bail, ce qui nous obligeait à trouver un repreneur mais en réalité ça nous arrangeait : on pouvait poser comme condition que le nouveau locataire reprenne tout. Draps, rideau de douche et machine à café compris ! On a littéralement sorti nos habits et nos tableaux de l’appart. C’est tout.
B.- On était déjà partis dix-neuf mois. Du coup, cela ne nous faisait pas trop peur. On avait déjà l’habitude de partir avoir trois affaires dans un sac à dos.
Q. – Quelle a été votre première destination ?
F.- La Thaïlande, Chiang Mai début octobre 2016 à fin mars 2017.
Q.- Comment avez-vous entendu parler de Chiang Mai ?
B.- Sur Internet. On présente souvent Chiang Mai comme la capitale des nomades digitaux. C’est un spot qui attire beaucoup de gens pour le travail en ligne. La vie est très bon marché. Internet est excellent. La ville se situe au nord de la Thaïlande : l’hiver, il ne fait pas trop chaud. On s’est dit pourquoi ne pas aller voir à quoi ressemble cette communauté de nomades digitaux et rencontrer un maximum de monde.
Q.- Aviez-vous des attentes particulières avant de partir à Chiang Mai ?
F.- Tout s’est passé très vite. On ne s’est pas vraiment renseignés à vrai dire. On est arrivés là-bas sans grande préparation. Sans savoir dans quel quartier s’installer. On avait réservé une guest house pour trois nuits. On a donc vu un peu sur place. Du coup, on n’a pas eu trop de choc ou de difficultés, car on ne s’attendait pas à grand-chose.
B.- On avait déjà voyagé en Thaïlande. Ce n’était donc pas l’inconnu complet.
Q.- Alors, Chiang Mai, c’est comment ?
B.- C’est une petite ville. Après Bangkok, qui est gigantesque, c’est la deuxième ville du pays. Beaucoup plus petite. C’est un drôle de mélange entre culture thaïe et un grand nombre de travailleurs expats ou de touristes.
F.-… pas mal de backpackers…
B.- oui, c’est un drôle d’écosystème…
F.- … avec les retraités aussi. Chiang Mai, ça fonctionne beaucoup par quartiers.
B.- C’est un mélange qui marche plutôt bien. Une ambiance vraiment particulière : on retrouve la culture thaïe et beaucoup d’autres aspects liés à la présence des expats.
Q.- Quel type de nomades digitaux trouve-t-on à Chiang Mai ?
F.- C’est un milieu très anglophone. Les francophones sont denrée rare. On s’est rendus à quelques événements organisés par la communauté. Sur Facebook, le groupe « Chiang Mai Digital Nomads » publie tout ce qui se passe dans la ville. Si l’on veut, il y a moyen d’aller chaque soir à une conférence, un meet-up, un cours de photos, un repas ou un autre événement. Il y a tout le temps des choses qui s’organisent. C’est une communauté très soudée. Jamais les mêmes gens. En même temps, il y a aussi beaucoup de personnes qui, depuis sept ou huit ans, installent chaque année leurs quartiers d’hiver à Chiang Mai entre novembre et mars. Il y a une sorte de noyau de base d’habitués et aussi tous les nouveaux qui restent quelques semaines à six mois. Il y a vraiment une bonne ambiance.
B. – En hiver, il faut dire qu’il y a pas moins de 20 000 nomades là-bas.
Q .- Avez-vous rencontré des nomades digitaux suisses à Chiang Mai ?
B.- Des Suisses, oui mais des backpackers, pas des nomades.
F.- Les Suisses, on est un peu des exotiques.
B.- C’est vrai que notre vécu est un peu biaisé. On rencontre souvent des gens qui ont lu notre blog. On a rencontré quelques francophones, mais pas beaucoup.
Q.- Comment choisissez-vous vos destinations ?
B.- En fonction des opportunités. Chang Mai, c’était une excellente destination parce qu’on débutait et on avait un petit budget.
F.- On avait un bon pour un billet d’avion qu’on devait utiliser. Il fallait l’utiliser pour un seul vol. Donc, on s’est dit autant aller le plus loin possible (rires) !
B.- Pour la prochaine destination, ce sera la France car un projet professionnel nous appelle là-bas. Si on n’a pas de projet professionnel qui nous emmène vers une destination précise, on va là où on envie. A la base, on pensait aller aux Canaries cet automne mais il y a eu ce projet professionnel en France. C’est l’avantage de ce mode de vie : la super-flexibilité.
Q : Comment organisez-vous votre logement ?
B.- A Chiang Mai, on avait réservé pour trois nuits puis on a cherché un appartement une fois sur place. Pour la France, c’est vrai qu’on n’y a pas encore réfléchi. C’est un projet de plusieurs mois où l’on va se déplacer chaque mois sans doute. On s’organisera probablement un mois par-ci un mois par-là. On va sans doute utiliser les plates-formes en ligne.
F. – Les guest house, on s’est rendu compte que pour les vacances et pour rencontrer du monde c’est bien. Pour travailler, c’est difficile. Dans les chambres, il n’y a pas de wi-fi. Il faut aller dans les espaces communs, qui sont bruyants et bondés. Il nous faut vraiment une table et Internet.
Q.- Quel bilan tirez-vous de cette première année en tant que nomades digitaux ?
F.- Pour moi, il est à 200% positif. Aussi au niveau personnel. Avant, j’avais un travail où j’étais très stressée. C’était un environnement intéressant qui me plaisait beaucoup, mais je sentais que physiquement et mentalement, je ne tiendrai pas jusqu’à la retraite. Maintenant, je me sens apaisée. Je fais ce que j’aime. Financièrement, on est à des années-lumière de ce qu’on gagnait avant. Mais ce n’est pas grave.
B.-… oui, c’est aussi un état d’esprit. Notre bilan, pour l’instant est plutôt positif. Il y a des défis à relever, c’est sûr. On a choisi ce mode de vie pour la flexibilité et la liberté. Pour travailler sur des projets qui nous tiennent à cœur plutôt que de travailler pour quelqu’un d’autre. Oui, on n’a pas les mêmes revenus qu’avant… mais on a tout le reste. Ça compense largement.
Q.- C’est important, la flexibilité pour vous ?
B.- Oui, c’est vraiment le gros avantage de ce mode de vie. Si, tout à coup, une idée nous passe par la tête ou si on a une opportunité dans une start-up à quelque part dans le monde, on peut le faire si on en a envie.
Q.- Qu’est-ce qui vous motive aujourd’hui ?
F.- Les nouveaux projets. Les gens avec qui on travaille. On a rencontré tant de gens géniaux. Des gens avec qui on a adoré travailler. Ce sont des rencontres aussi qui font qu’on a envie de faire du bon travail. Ce n’est pas forcément la même relation avec un client dans le cadre de l’entreprise. C’est une relation beaucoup plus directe et personnelle. C’est un gros plus.
Q.- Quelles sont vos sources de revenus ? Sur quels mandats travaillez-vous ?
F.- On fait du développement web, mais pas seulement. Par exemple, on revient du Tour des Dents-Blanches. On a refait tout le site Internet. On s’est engagés à passer six jours sur place, à prendre des photos et à écrire les textes. On leur livre un produit complet et fini.
B.- D’autant qu’on a la chance de pouvoir choisir un peu nos clients. Le Tour des Dents-Blanches, c’est un projet qui nous correspond. Cela nous permet de vivre l’expérience et au final de proposer au client un site vraiment personnalisé avec des photos et des textes homogènes. Un développeur classique n’arriverait pas un résultat aussi abouti à mon avis.
Q.- Comment trouvez-vous vos clients ?
F.- Pour l’instant, c’est beaucoup du bouche-à-oreille. De par notre blog, on travaille beaucoup dans le domaine du tourisme. Parfois, les rencontres se font par hasard. Comme l’année passée, on est arrivés dans une buvette d’alpage avec nos deux appareils photos, nos trois objectifs et tout notre matériel. Le propriétaire nous a demandé ce qu’on faisait dans la vie. Il nous a invités à boire le café. On lui a expliqué. Ça lui a plu. Il a dit qu’il nous rappellerait. Un peu plus tard, il nous a proposé le mandat sur le Tour des Dents-Blanches.
Q. – Autrement dit, vos clients vous viennent essentiellement via votre blog, du bouche-à-oreille et des rencontres faites sur place ?
B.- Oui, notre blog est une excellente vitrine de compétences. Il y aussi les gens que l’on rencontre au hasard de nos déplacements. En Birmanie, on a sympathisé avec un jeune Français et on a fait un bout de route ensemble. Plus tard, il nous a recontactés parce qu’il avait rencontré un Suisse qui avait un restaurant italien à Bagan et qui avait besoin d’un nouveau site Internet.
Q. – Parlons projets, y en a-t-il un qui vous tienne particulièrement à cœur ?
F.- On a des projets de livre au format papier, mais c’est encore un peu tôt pour en dire plus!
B.- En tant que geek du couple, ce qui me tient à cœur c’est le développement de la nouvelle version de notre site. Ce qui me motive, c’est d’améliorer chaque jour mes compétences, côté développement web mais aussi hébergement, serveur, etc. J’adore avoir la liberté de faire ça tous les jours.
Q.- Un conseil pour un apprenti nomade digital ?
F.- Il faut savoir être et rester curieux ! Mais aussi être conscient que c’est beaucoup de travail. Il y a l’image faussée de l’ordinateur à la plage. Ce n’est pas facile tous les jours. C’est très beau et c’est vraiment cool. Je pense que c’est bien d’avoir un métier avant de penser à être nomade digital. Nomade digital, ce n’est pas un métier. C’est important d’acquérir des compétences. De se faire un petit réseau. De soit avoir déjà quelques mandats, soit mettre de l’argent de côté avant de partir.
B.- Je pense qu’il faut aussi y croire vraiment. Mais aussi identifier les compétences qui nous sont propres et qui nous permettraient de travailler en ligne. Se former aussi. Lire sur le sujet. Il y a tellement d’offres en ligne maintenant. Je pense que rien n’est impossible. Moi, j’étais doctorant en biomécanique. Je ne connaissais rien au développement web. J’ai pris le temps de me former sur le sujet. Combiner passion et persévérance. Je pense que c’est ça la clé.
4 Commentaires
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Des sources d’inspiration ?
B.- Plein ! Mike Horn, pour la philosophie de vie. Le youtubeur Alex Vizeo, pour l’inspiration au voyage.. Le site smartpassiveincome.com pour les possibilités de réaliser des revenus passifs en ligne.
F.- J’aime beaucoup le couple canadien de hecktictravels.com, je les trouve très touchants.
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Un objet sans lequel vous ne partez jamais?
F.- Le mari, ça compte (rires) ? Sinon, les chaussures de rando!
B.- Les backpacks!
Si vous n’étiez pas nomades que seriez-vous?
B.- Moi, je serais développeur. Ça me plaisait bien aussi. Je pouvais travailler beaucoup à la maison.
F.- Je trouverais un job dans le tourisme. Je ferais un travail dans lequel je suis au contact avec les gens, pas dans un bureau enfermé.
Un dicton, une citation?
B.- Ne pas hésiter à tester de nouvelles choses, ou à sortir de sa « zone de confort » même si c’est un terme qu’on n’aime pas trop.
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Portrait robot du nomade 2.0
L'ère du tout numérique a donné naissance à une nouvelle tribu, celle des nomades digitaux. Ordinateur portable sous le bras, ils partent installer leur bureau nomade où bon leur semble.... pourvu qu'il y ait du wi-fi. Mais de quoi s’agit-il exactement ? ...
Là où tout a commencé…
On me demande souvent comment tout a commencé pour moi. Comment j’ai eu l’idée de devenir nomade (en l’occurrence, dans mon esprit, une freelance voyageuse) ? Tout a commencé sur cette plage, sur une île volcanique à une centaine de...
Mais que font-ils?
Sur Facebook, Instagram & Co., ils posent dans un hamac sur fond d'océan Pacifique ou sur une terrasse en bambou au cœur de la forêt thaîlandaise. Leur tenue de travail? T-shirt, short et tongues. Et ils bossent (si, si,!). Mais dans quoi exactement?...
Interview très intéressant! Merci pour ce partage
Hello Régis! Merci pour le compliment. Contente que l’interview te plaise!
Merci de nous avoir donné la parole sur ton blog et à tout bientôt 🙂
Ce fut un plaisir! A bientôt :-)))